Lorsque l’on évoque le management à distance, beaucoup de managers se sentent perdus. Peu d’entre eux y ont été vraiment confrontés encore aujourd’hui et surtout ils n’ont que rarement eu l’occasion d’y être formés.
A l’heure actuelle, nous évoquons souvent ce management notamment avec les 2 périodes de confinements que nous avons vécus et continuons à vivre cette année.
Pourtant, cette pratique est déjà réalisée au quotidien, notamment par des managers qui gèrent des équipes de prestation de service nomades.
Elle est aussi de plus en plus déployée afin de manager des équipes délocalisées et plus communément en management transversal.
Avant d’être résumé à l’art d’utiliser les bonnes techniques et les bons outils de communication, le management à distance est un acte fort du manager nécessitant la mise en œuvre d’un certain nombre de qualités interpersonnelles.
Comment réussir à garder le cap, maintenir le collectif et surtout s’assurer de l’implication de chacun ?
Une source de stress pour le manager
Commençons d’abord par l’impact de cette distanciation avec l’équipe pour le manager.
Pour certains managers peu habitués au travail à distance, cela va créer une source de stress supplémentaire induite par différents facteurs :
- la peur de ne plus pouvoir contrôler efficacement le travail du collaborateur
- la méfiance vis-à-vis du collaborateur et de son temps « réel » de travail
- la frustration de ne pas partager des moments de convivialité avec l’équipe
Tous ces ressentis risquent de créer un climat délétère vis-à-vis des collaborateurs, de pousser le manager au sur-contrôle pour se rassurer. Cela peut vite engendrer un cercle non vertueux et participer à la démotivation du collaborateur.
C’est aussi émotionnellement épuisant pour le manager qui risque de ne plus trouver en lui l’énergie suffisante pour maintenir la dynamique de l’équipe.
Un niveau de motivation fluctuant pour le collaborateur
Pas de stéréotype de ce côté-là non plus.
Certains collaborateurs adoptent très bien le travail à distance. On parle de collaborateurs « auto-motivés », qui déjà naturellement en présentiel, savent s’organiser, sont indépendants tout en référant et donc vont continuer à mener leur activité sans grosses difficultés.
Pour d’autres, au contraire, la perte d’un repère journalier (rituel de déplacement, d’échanges le matin avec les collègues puis le hiérarchique…etc) peut provoquer assez vite une démotivation du collaborateur engendrant désorganisation, baisse d’implication, sensation d’isolement, abattement…etc.
La prise en compte individuelle de l’impact du travail à distance sera donc fondamentale pour que le manager soit en mesure de maintenir l’engagement de chaque collaborateur.
Vers un management plus adapté
Plus que jamais l’utilisation du management situationnel sera clé dans ce contexte avec la prise en compte des besoins de chacun.
Un management adapté à la fois au collaborateur mais aussi à la manière dont il vit cette situation occasionnelle ou récurrente de la distance.
Par exemple, un collaborateur qui, naturellement cadré par le fait de venir physiquement travailler, peut demander au manager de pratiquer un management plus directif à distance afin de le sécuriser et de lui permettre d’exercer sereinement ses compétences.
Attention, directif ne veut pas dire autoritaire ! Il s’agira simplement d’expliquer clairement et de manière détaillée ce qu’on attend du collaborateur et bien sûr de vérifier la réalisation avec le collaborateur.
Dans le cas d’un collaborateur déjà habitué à travailler à distance (quelques jours par semaine ou de manière journalière pour les équipes externes), le manager adaptera sa pratique non pas à la distance mais aux différentes situations que peuvent rencontrer les collaborateurs dans l’exercice de leur activité à distance.
On comprend implicitement que le point-clé dans ces 2 situations sera la clairvoyance du manager sur le niveau de motivation du collaborateur à distance.
Dans cet exercice, le risque du manager est d’être lui-même phagocyté par sa propre perception du travail à distance et surtout son niveau de confiance dans le collaborateur.
Si selon lui, il faut avoir le collaborateur « sous le coude » pour être certain de ce qu’il fait, pour sûr, il trouvera que son collaborateur est démotivé.
Au contraire, s’il est lui-même à l’aise avec cette distanciation, il peut ne pas être lucide sur l’impact négatif pour certains de ses collaborateurs.
Il est donc primordial pour le manager de faire fi de ses propres interprétations et d’échanger clairement avec le collaborateur.
Vers un relationnel plus sincère
Comme évoqué, parmi les qualités interpersonnelles dont devra faire preuve le manager, la confiance est un point-clé pour manager à distance.
Celle-ci est le fruit de 2 facteurs combinés :
- les propres craintes du manager souvent issues d’interprétations sur le comportement des collaborateurs qui conduisent à suspecter plus que faire confiance
- l’engagement explicite du collaborateur, sa manière de montrer son implication même à distance, incitant à générer la confiance du manager.
Cette confiance va donc se créer et se nourrir au travers de pratiques relationnelles répétées.
Le manager doit s’enquérir régulièrement de la manière dont les collaborateurs vivent ce travail à distance.
Cela signifie questionner et surtout écouter activement sans juger.
Osez demander à vos collaborateurs comment ils se sentent, s’ils ont eux-mêmes des craintes, s’ils ont besoin d’aide ?
Ne vous contentez pas d’une réponse simple du style « Oui ça va ».
Le collaborateur doit comprendre que ce questionnement n’est pas là pour « fliquer » mais pour s’assurer qu’il est à l’aise avec la situation et qu’il peut compter sur votre soutien.
Le partage d’informations, pratique impérative pour créer une vraie cohésion d’équipe, paraît d’autant plus importante dans le management à distance car vous ne bénéficiez pas de ces petits moments du quotidien qui vous permettent de relayer des informations au fur et à mesure. Ce partage nourrit aussi la confiance du collaborateur au travers de l’importance que vous lui accordez.
Bien sûr, cette confiance n’exclut en rien le contrôle quel que soit le type de management en présentiel ou à distance.
Le contrôle nourrit la confiance du manager dans son collaborateur, il est donc primordial.
Pour autant, il ne doit pas s’intensifier dans le management à distance au risque de démotiver le collaborateur. A vous de mettre en place des outils différents de contrôle si nécessaire tout en maintenant la même périodicité.
Par contre, garder le contact le plus possible !
Afin de conserver la cohésion et la dynamique de l’équipe, le manager devra augmenter ses points de contact et d’échanges avec les collaborateurs (points individuels minimum 2 fois par semaine, réunion d’équipe au moins 1 fois par semaine, points d’informations…etc).
Ceux-ci se feront en visioconférence le plus souvent et par téléphone.
Ces temps d’échanges individuels ou collectifs doivent être planifiés afin de garder un fil tendu entre vous et l’équipe, maintenir le lien et aussi pour garder le cap et rappeler les objectifs.
En conclusion
Le management à distance demande un positionnement honnête de la part du manager :
- être clair sur son rapport émotionnel au travail à distance afin d’éviter d’interpréter les comportements des collaborateurs et de mettre en action les leviers qui vous rassurent (comme des points de contact réguliers avec l’équipe).
- écouter activement les collaborateurs afin de prendre en considération leurs craintes et leurs besoins. Ceci demande de planifier des vrais temps d’échanges individuels, en se laissant un temps centré sur la personne et pas uniquement sur son activité. Une bonne façon aussi de connaître et de mettre à disposition les moyens nécessaires au collaborateur pour mieux travailler.
- créer la confiance aussi bien pour le manager que le collaborateur. Garder un rythme régulier de contrôle sans l’intensifier.
- adapté le management à chaque collaborateur. Les collaborateurs ne vivent pas tous le travail à distance de la même manière et cela peut évoluer donc le manager doit rester en alerte et adapter très régulièrement son management en laissant le niveau autonomie qui convient à la situation.
Ce type de management demande beaucoup de disponibilité intellectuelle ainsi que d’organisation de la part du manager. Une grande partie de son rôle de manager est de gérer l’humain, d’être disponible afin d’accompagner ses collaborateurs.
Le management à distance lui offre l’opportunité de mettre encore plus à profit ses compétences relationnelles au service de l’engagement du collaborateur.